République démocratique du Congo
A des milliers de km de la conférence de Bonn, la lutte contre le réchauffement climatique se joue aussi dans les tourbières du bassin du Congo qui retiennent des tonnes de carbone dont le rejet dans l’atmosphère porterait un rude coup à l’accord de Paris.
C’est en tous cas l’argumentaire présenté par Greenpeace lors d’une récente mission dans un village isolé à trois heures de piste de Mbandaka, dans le nord-ouest de la République démocratique du Congo, à l’orée de la forêt équatoriale et ses sols marécageux.
Responsable “projet forêt” au sein de l’ONG, Matt Daggett plante le décor et les enjeux, les pieds enfoncés dans le sol humide.
“La forêt équatoriale du bassin du Congo est la deuxième plus importante au monde (ndlr: après l’Amazonie). Nous savons depuis des années qu’elle est cruciale pour la biodiversité des animaux et des plantes. Avec cette découverte, nous avons aussi appris qu’elle est cruciale pour le climat”.
Expert scientifique de la mission Greenpeace, Simon Lewis veut donner la mesure de l’importance des tourbières du bassin du Congo: “Nous avons publié pour la première fois cette année une carte qui montre qu’elles couvrent 145.000 km2, soit une zone un peu plus grande que l’Angleterre. Nous pensons qu’elles stockent environ trente milliards de tonnes de carbone”.
“Cela représente autant de carbone que les émissions d‘énergie fossile de toute l’humanité sur trois ans”, avance le scientifique.
Pour en avoir le coeur net, la mission de Greenpeace prélève des échantillons des précieuses tourbières à des fins d’analyse dans un laboratoire de l’université de Leeds, dans le nord de l’Angleterre.
Greenpeace avance déjà ses premières conclusions: il faut protéger les sols et sous-sols de cet endroit du monde pour ne pas accélérer le réchauffement climatique et respecter l’accord de Paris signé en 2015 qui prévoit de plafonner la hausse des températures à deux degrés par rapport à l‘ère pré-industrielle.
Aide internationale
“Si les tourbières s’asséchaient, si elles étaient transformées en espace agricole, le carbone stocké dans les sous-sols seraient relâché dans l’atmosphère et cela aggraverait le problème du changement climatique” selon Simon Lewis.
Agriculture intensive, irrigation, déforestation, construction de routes, assèchement des tourbières…: pour éviter cette spirale de la catastrophe, Greenpeace mise sur les villageois, leur mode de vie séculaire, leur attachement ancestral et spirituel à la forêt.
“Que les communautés continuent de faire ce qu’elles ont toujours fait: pêcher, vivre dans les forêts, c’est la meilleure manière de les protéger”, assure Matt Daggett de Greenpeace.
Ce message peut facilement passer auprès des quelques centaines d’habitants de ce village de Lokolama qui vivent très pauvrement (cueillette, agriculture, chasse, pêche…).
Mais leur misère peut aussi reléguer au second plan la protection de l’environnement.
“Tout le monde fait pression sur la forêt”, déplore un habitant, Valentin Engobo, représentant des peuples autochtones de Lokolama, qui met cette pression sur compte d’une “pauvreté extrême”.
“Au lieu de créer des activités génératrices de revenus afin de donner un peu de repos à la forêt, nous la détruisons afin de chercher des moyens de survie”, ajoute-t-il en lingala, l’une des quatre langues nationales de la RDC en plus de la langue officielle, le français.
Le gouvernement profite de la mission de Greenpeace et de la COP23 pour lancer un appel à l’aide internationale. “Les efforts de la RDC pour protéger les forêts ne sont pas suffisamment rétribués par la solidarité internationale”, selon un conseiller du ministre de l’Environnement, Joseph Katenga.
“Le pays s’attendait à des financements conséquents pour mettre en oeuvre des projets de développement en faveur des communautés locales et d’une agriculture durable qui limite la déforestation. L’Etat n’a pas les moyens”, ajoute-t-il.
Réunis à Bonn jusqu’au 17 novembre, les représentants de 196 pays doivent s’accorder sur les règles d’application de l’accord de Paris, qui souffre du retrait américain décidé par le président Donald Trump.
La conférence a commencé avec un nouveau signal alarmiste: les années 2013 à 2017 sont bien parties pour constituer la période de cinq ans la plus chaude jamais enregistrée selon l’Organisation météorologique mondiale.
AFP
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